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dimanche 30 juin 2013


« Si d'aventure il avait vécu octogénaire, une hypothèse loin d'être déraisonnable, Camus aurait connu : l'Algérie indépendante, les barricades de Mai 68, le rire de Cohn-Bendit narguant les CRS, le général de Gaulle évincé du pouvoir, le vieux chêne abattu sur sa table de jeu, les deux règnes conservateurs du banquier normalien agrégé de lettres, Pompidou de Montboudif, et de l'accordéoniste auvergnat, Giscard d'Estaing de Chamalières. Il aurait aussi vu accéder à la magistrature suprême un socialiste jadis décoré de la francisque, Mitterrand de Jarnac. Il aurait assisté, sûrement médusé, à la conversion de l'ancien ministre de la Justice qui envoyait les nationalistes algériens à la guillotine en conscience morale de la gauche devenue la figure emblématique de l'abolition de la peine de mort – une aubaine morale pour un homme dont la réputation était qu'il en avait si peu. Il n'aurait pas manqué de voir comment cet homme instrumentalisa l’extrême droite pour rester au pouvoir deux fois sept ans et comment il brada les idées de gauche qui l'avaient conduit à l'Elysées deux ans après son arrivée au pouvoir. Il aurait vu paraître L'Archipel du Goulag de Soljenitsyne et constaté qu'en compagnie de « Nouveaux Philosophes », BHL se réclamait de lui avant de le salir gravement dans Le siècle de Sartre – un plaidoyer pour la grandeur de Sartre qu'il aurait pu lire à l'âge de quatre-vingt dix sept ans ! Il aurait assisté également à la mort de Franco, à celle de Mao, à celle de Sartre, à la chute du mur de Berlin, à l'effondrement des pays de l'Est – il aurait eu soixante-seize ans seulement. Quels beaux livres il nous aurait donnés ! Quelles belles parutions que la réunion des chroniques inspirées par ces mouvements de l'Histoire dans Actuelles IV, Actuelles V, etc ». Michel Onfray, « L'ordre libertaire. La vie philosophique d'Albert Camus » Flammarion 2012 p.520.
« Mai 68 fut l'occasion pour la jeune génération de philosophes de donner son congé à Sartre . Cohn-Bendit faisant passer un petit mot à Sartre lors d'une AG à la Sorbonne pour lui dire : « Sois bref » résume bien la situation ! Michel Onfray, « L'ordre libertaire. La vie philosophique d'Albert Camus » Flammarion 2012 p.536.

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