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vendredi 10 octobre 2014

"L’ossuaire accueillant les combattants inconnus s'étend le long d'un sous-bois. Ces hommes, jetés sans distinction dans le béton, n'ont pas eu droit à une sépulture individuelle. L'anonymat est tout-puissant dans cette mêlée de corps sans nom. Il s'agit là d'une spécificité bien française. Les Anglais réservent une tombe à chaque combattant, que l'identité soit connue ou non. Les Canadiens, quant à eux, ont planté sur le site de Vimy autant d'arbres que de soldats disparus. la France a préféré une fosse sans âme...
Ce pays a-t-il honte d'honorer ses morts? Ne serait-ce que dans l'Aisne, combien de carrés militaires sont livrés à l'abandon, enfouis sous les mauvaises herbes, avec leurs croix fissurés et leurs plaques mordues par l'érosion? Combien de chantiers et de bennes à ordures bafouent les soldats dormants dans la glèbe? Combien de noms s’effacent par jour? Combien de poilus meurent une seconde fois? J'admire les Américains, les anglais, les Canadiens ou encore les Australiens qui entretiennent avec soin leurs sépultures. les cimetières allemands, très nombreux en France, sont également d'une tenue irréprochable: dans une veine romantique, de grands arbres bousculent affectueusement les tombes. Outre-Rhin, on redouble d'attention pour "les croix de fer". La VDK, association populaire allemande pour l'entretien des tombes de guerre, mobilise plus de 200 000 jeunes. Chaque été, ils partent à l'étranger, sur les champs de batailles, pour laver les croix, arracher les mauvaises herbes, fleurir les sépultures. Autant d'initiatives bénévoles qui ont pour devises "réconciliation par-dessus les tombes, travail pour la paix". A quand de telles actions en France? J'ai la faiblesse de croire qu'un pays qui respecte ses morts est un pays qui a de l'avenir.
A la désinvolture des autorités françaises, il est inutile d'opposer un quelconque "devoir de mémoire". Cette expression est pour moi dénuée de sens. Il me parait absurde d'imposer un souvenir à coups d'obligations morales. La mémoire doit s'épanouir naturellement dans l'esprit de chacun. On ne réveille pas les morts avec des devoirs". Jean-Luc Pamart  Le paysan des Poilus Editions des Équateurs p.162

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